11 mai 2008

SURPRISE À L'ARRIVÉE

Je ne suis pas dans le corridor aérien gravé dans ma mémoire par les photos de Lo, archivées dans son appareil. Ce que j’arrive à percevoir par le hublot fait davantage large parc industriel que quartier résidentiel de maisonnettes à toits de tuiles symétriquement alignées. Dès que l’avion touche le sol, je cherche du coin de l’œil sa tour de contrôle ; l’avion fait un dernier virage, je l’aperçois très au loin; et se profile le nouvel aérogare, que Laurent avait photographié, en construction.
Le temps a fait son œuvre. Je ne suis pas encore dans les traces de mon fils ; mais sans lui, je ne serais pas là.
L’espace intérieur du nouvel aéroport est immense et lumineux : il est soutenu par une muraille de verre que freine la courbe d’une voûte dorée, diffusant un éclairage tamisé sur des colonnades laquées de rouge. Cela donne le sentiment que la Chine s’ouvre au monde.
Au travers de panneaux vitrés, je vois, à l’étage inférieur, un labyrinthe de boutiques hors taxes. Au-delà des portes et des formalités de l’immigration, un métro hors-terre d’environ un kilomètre mène aux bagages, à la douane et à la sortie.
Carmen est là ; nous refaisons connaissance. Le chauffeur de taxi trouve la valise pesante ; je lui remets l’adresse en chinois que l’hôtel, par interne, m’a fait parvenir avec la confirmation. Carmen s’assoit devant pour s’assurer qu’il suivra le bon chemin. À peine engagé sur l’autoroute, une empoignade éclate entre eux, tant et si bien que suite à plusieurs arrêts en bordure de l'autoroute, nous nous retrouvons dans une ruelle, entourés de badauds, devant un poste de police.
Carmen me conseille de ne pas dire un mot. De toute manière, je me demande comment, je pourrais être compris. Le compteur roule. Au moment où l’officier se penche, je lui tends la feuille sur laquelle est inscrite l’adresse de mon hôtel. Il échange quelques mots avec le chauffeur lui indiquant du doigt une direction. La voiture quitte la ruelle à reculons. Nous sommes à deux coins de rue. Le chauffeur aurait perdu la face ; il ne savait pas où se trouvait l’hôtel. La course coûte à peine 15$ ; le portier de l’hôtel doit cependant intervenir pour séparer les belligérants qui n’en finissent plus de s’invectiver et de se repousser physiquement comme des enfants. Ouf !!!
Le comportement de mon hôtesse me semble excessif ; mais ais-je d’autre choix que de me fier à son expérience ? à sa connaissance de Beijing ? Il faut prendre sa place. Les Chinois haïssent les blancs et font tout en leur pouvoir pour les extorquer ? De plus, elle est une femme. Elle avance que nous avons déjà été repérés par la police dès le départ ? Il y a des micros dans tous les taxis pour enregistrer les conversations ? Pourquoi mon visa n’est-il que de trente jours, alors qu’il aurait pu être de 60 ?
Son appartement a déjà été fouillé, à son insu; elle a été suivie plus d’une fois. Décidément, ce séjour s’annonce périlleux.
En fin de soirée, je prends mon premier repas en sa compagnie : une fondue chinoise tord-boyaux. Je dépose ensuite ma compatriote dans un taxi, commandé par le concierge de l’hôtel. Carmen reviendra demain matin me chercher pour que je gagne son appartement, jugé plus sécuritaire et à son avis moins à risque de surveillance que celui où je me trouve.
Pendant quelques minutes de marche, avant que je n’emprunte le couloir extérieur du jardin qui conduit à l’entrée de mon appartement, il y a effectivement quelqu’un derrière moi jusqu’au bureau du registraire. Un hasard ?
Je m'endors et une odeur de fleur printanière me réveille presque aussitôt.
Non, je ne ferai pas de cauchemards.