04 avril 2009

MONTAGE 11

Soushiant Zanghanepour a été l'un des plus proches amis de Laurent à Paris. En Chine, ils occupaient la même chambre. Iranien d'origine, ses parents ont immigré au Canada; il est diplômé de l'University of British Colombia et son frère enseigne à l'université McGill. Cet ami travaille actuellement au Simons Centre for Disarmament and Non Proliferation Research, à Vancouver à titre de recherchiste et de responsable de projet sur l'Iran. J'ai fait une entrevue de presque deux heures avec lui.

De ce qu'il raconte sur les trois derniers jours à Beijing, presque d'heure en heure par moment, j'ai sélectionné une vingtaine d'extraits. Il était avec les 4 autres étudiants et l'étudiante qui ont accompagné Laurent à la clinique SOS International, la veille de l'accident. En fait, si une méthode de montage élémentaire est de commencer par jeter au panier ce qui est mauvais, je suis dans une situation difficile: j'ai presque tout conservé de ses propos. Ils sont détaillés, intéressants, personnels; Soushiant se met en scène dans un ordre rigoureux et avec une volonté de contrôle du récit; il sait ce qu'il veut dire et a imaginé comment le dire; il s'exprime dans un registre d'une théâtralité surprenante, joue le jeu du conteur à s'y prendre lui-même et à perdre le fil de sa pensée, admet la partialité de ses perceptions. Je l'ai laissé aller. Ses silences sont éloquents.
Une idée de structure jallit; je pourrais n'avoir que lui comme interlocuteur, comme fil conducteur, comme ligne rouge.
Mais à ce stade-ci, ce ne peut-être qu'une hypothèse...
Il me reste encore d'autres entrevues à décortiquer.
Et celles dont la sélection a été faite sont déjà loin dans ma mémoire.
La difficulté avec le rythme de travail que je m'impose ou que les circonstances m'imposent, actuellement, est que je suis dans une aventure sans limite, exploratoire, obscure.
J'avance à pas de tortue dans la nuit, par instinct, sans autre contrainte que moi-même et un volume inouï de souvenirs...
Mais j'avance.