15 juillet 2008

LA GRANDE MURAILE ET LE RESTE

La wagonnette est là, le samedi matin, 5 avril, 08 h 00.
Le guide m’accueille et fait glisser la portière. Il monte à l’avant, aux côtés d’une chinoise dans la trentaine au volant.
Présentations en anglais: juste derrière moi, un étudiant néerlandais qui est en transit, en route vers le Vietnam où il va finir une maîtrise à Hanoi; un couple d’américains qui enseignent l’anglais dans un collège près de Shangai occupe le dernier siège.
Nous sortons de la capitale par une autoroute que nous n’abandonnons qu’au bout d’une demi-heure pour emprunter la rue principale d’une petite ville et une route de campagne, bordée d’arbres fruitiers en fleurs. Premier arrêt : les tombeaux des Mings. Là, je trouve un autre repère; Laurent est déjà passé par le même circuit: les arbres qui poussent dans la muraille. Avant de partir, j’ai dit à Michèle que je n’allais pas là-bas faire des photos car j’étais trop impressionné par celles que Laurent y avait prises…Reparties, nous nous arrêtons dans une boutique de jade dirigée par l’état. Au deuxième étage, j’aperçois un objet retrouvé dans ses effets personnels : une bille de jade, de la grosseur d’une balle de golf, rattachée par un ressort d’environ 8 centimètres à une poignée en jade; en balançant cette bille au-dessus d'une épule, on se masse une omoplate; il y en beaucoup à vendre en différentes teintes vertes. Cette fois, ce souvenir m’enfonce une émotion profonde dans la gorge . Je suis dans ses traces, c’est vrai; il s’est arrêté ici même et en a sélectionné un de ses souvenir utile pour touriste qui se trouve maintenant sur le dessus du piano dans le salon de la maison. Pendant des minutes, je tourne autour de ces balles de jade qui renferment jusqu’à 4 sphères sculptées par l’intérieur, s’emboîtant l’une dans l’autre; c’est l’un des plus vieux et des plus complexes artisanats du monde. Une vendeuse m’explique que celle que j’ai entre les mains représente la famille. Dommage pour elle qui ne sait pas qu’il manque une sphère à la mienne. Je ne me sens pas en mesure d’acheter quoique ce soit ici. En sortant je vois un artisan au travail qui a peut-être été photographié par Laurent.Le lunch est compris dans le forfait de cette excursion; le guide nous conduit dans la salle à manger et nous abandonne à une hôtesse; il ne mangera pas avec nous. Service à table sur un plateau tournant. Quand il revient nous chercher, il nous annonce que nous n’irons pas comme prévu au tronçon de Badaling; il y a trop de monde. Déception. Je perds la trace de Laurent.C’est samedi et il nous propose un autre site pas très éloigné : Shixiaguan.
Là aussi la muraille est envahi. Nous partons chacun de notre côté et devons nous retrouver à la camionnette dans 2 heures.
Je ne m’attendais pas à faire de l’escalade; les marches de pierre sont loin d’être toutes de la même hauteur; les écarts entre elles peuvent être de 15 à 40 cm. Par endroit, le passage est étroit et ne laisse place qu’à deux personnes : l’une qui descend et l’autre qui monte. Même les enfants doivent s’arrêter pour reprendre leur souffle. Il y a quatre tours, espacées d’environ 300 mètres; je m’arrêterai à la troisième.
Quoique limité par un mélange de nuages bas et de smog, le tracé de la muraille sillonne des montagnes rocailleuses et clairsemées de touffes d’arbustes en fleurs; c’est beau et apprécié par cette procession de familles chinoises de tout âge. Il n’y a pas un pourcent d’occidentaux.
La descente est plus facile. En bas, cinq jeunes hommes tiennent à me prendre en photo avec eux. Je suis une curiosité, tiens…
Au retour, par un chemin de campagne à deux voies jusqu’à l’autoroute, la chauffeur fait état de ses habiletés; elle ne se prive pas pour doubler (devrais-je dire tripler?), sur la chaussée d’extrême gauche, un camion à légumes dépassant un autre camion à légumes. Le guide n’a pas la chance de voir la scène; tourné vers nous, il se doute bien à notre mine que nous sommes pas habitués à faire des cascades; cette situation semble l'amuser. Pour nous distraire, il expose le reste de la visite : le stade olympique, un salon de thé, une fabrique de soie. Le choix de ces arrêts repose sur le potentiel d'achats que nous sommes en tant que touristes; malheureusement pour lui, nous ne sommes pas acheteurs, mais très curieux et épicuriens.
Le guide nous déposera finalement vers 18 h 00, au meilleur restaurant de canard laqué de Pékin (selon lui), non sans avoir réussi à vendre aux américains et à moi des billets de soirée. C’est là que l’étudiant néerlandais nous fera ses adieux. Le restaurant est à 50 mètres d’une salle de spectacle qui présente un show de kung-fu en représentation depuis 2001.
Malgré la fatigue, je ne le regretterai pas. Cet art martial millénaire est réellement acrobatique. Les chorégraphies le maniement des armes en groupe, les épreuves d’endurance à la douleur, la musique s’enchaînent à travers le récit initiatique d’un enfant dans un décor modeste mais efficace. Des autobus bondés de club de l’âge d’or américains ont déversé leur clientèle au parterre et au balcon. Standing ovation; réveil brutal; où suis-je? je m'etais assoupi.
Pas facile de trouver un taxi dans les environs. J’ai hâte de tomber dans les bras de Morphée.

PS Les photos sont de Laurent.