15 septembre 2011

MONTAGE 29


Accepte, s’il-vous-plaît, ami ou amie, que je jette ici quelques bribes d’événements et de réflexions, depuis un silence volontaire.
Ils sont dans l’ordre où j’ai eu l’énergie de les inscrire.
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Je le fais ou je ne le fais pas, ce film.
Quand sera finie cette aventure, je m’inquiète déjà du néant, du vacuum, que cet aboutissement provoquera. Quand sera disparu ce lien qui m’unit à mon fils par cette façon de régler mes comptes avec le destin. Terreur du vide.
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La colère habite bien des parents. Par rapport à leurs enfants. 
Elle m'habite encore. Même s'il n'est plus là, dans ce qui m'échappe d'incompréhensible.
Chercher l’équilibre. Les enfants grandissent et cherchent à grandir avec les moyens à leur disposition. Ils ont besoin de sécurité, d’affection, d’encouragement.
Parfois ils vont trop vite aussi. Pour nous faire plaisir. Par mimétisme.
Quand c’est par rapport à nos travers, ça peut même aller.
Mais quand ça vient d’ailleurs; d’une autre planète; de la télévision; de la mode; en singerie; c’est toute une autre histoire. On ne les reconnaît plus. Ils s'imprègnent d'un environnement social qui dépasse nos références familiales.
Comment respecter leur caractère unique perceptible dès leur naissance, ne pas perdre de vue l'impact de leur point de départ?
Il a tellement été ce qu’il fut à sa naissance. J'ai essayé d'éviter de le modeler. Tellement ce n’était pas nécessaire. Il a fini par me ressembler.
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J'attends le retour de Cannes d'un vieil ami...
Il est prêt à m'aider.

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U2 est à Montréal, ce soir. On parle du spectacle de l’année à Montréal. Je ne suis pas un fan. Je les connais de nom. Mais October était dans sa discothèque. Je fais connaissance avec cet album. Je ne saurai jamais quelle place cette musique a pu avoir dans sa vie. J’étais trop occupé alors.
Je suis troublé de ne pouvoir être au spectacle ce soir, car il n’est plus là. Je l’aurais peut-être accompagné; je me serais invité. À la limite, j’y serais allé seul , en me disant que le hasard le placerait sur mon chemin. Ou, avec nos cellulaires, on aurait pu se repérer, s’orienter, se croiser; j’aurais eu le courage d’affronter cette foule d’une autre de génération. Respirer leur époque. Ça donnerait des ailes, me semble.
Seul, sans lui, jamais. Mon esprit d’aventure se réduit petit à petit.
Demain, on célèbre les 70 ans de D., sa marraine, à  Saint-Bernard.
Je suis troublé un peu d’être là, car Lo ne sera pas là, plus là. Lui qui s'y rendait, à l’improviste, pour simplement leur dire bonjour...
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Me reviennent les pourquoi de certains tournages à Paris.
Au père Lachaise. Pourquoi pas?
Écrire. Je suis las. Fatigué. Miné.
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Encourageant et positif. Un producteur évalue à nouveau le projet suite au providentiel appui de mon ami touché, distributeur intéressé.
Calcul : retracer et comptabiliser les factures des frais personnels, déboursés à ce jour (tournage à Paris, en Chine, montage). Pas le temps personnel consacré, seulement le « cash ».
Ils en ont besoin pour évaluer mon investissement jusqu’à maintenant. Je réalise à quel point les chiffres me font chier. Enfer. Vous imaginez ce que peut être le décodage des factures rédigées en chinois, il y a déjà 4 ans. Quand je pense que j’ai consacré 10 ans de ma vie à faire de la production.
Mise en veilleuse du montage. Pause. Il faut attendre ces échanges de point de vue à se donner une perspective commune. Un art d'équipe. Une buziness de loaner. Regarder dans la même direction pour aboutir sur un écran public.
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À la lecture du roman L’Ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon, je comprends mieux qu’il reste de moins en moins de part de jeunesse en moi. L’âge l’a faite décliner subrepticement et toute sorte d’expédients sont nécessaires pour la restituer. Bander finit par être une corvée; la volonté n’a rien à voir avec la faculté d’érection. Désir essentiel. Je meurs à petit feu. Laurent n’est pas là pour refléter son image en moi. Une partie de ce que je suis est morte avec lui. Projection interdite.
Ses amis, recrutés à travers le réseau social FB sont un faible reflet de ce qu’il a été, de ce qu’il aurait pu être. « Nous restons vivants tant que quelqu’un se souvient de nous. »
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Je me réveille la nuit en essayant encore de remettre les morceaux du casse-tête ensemble. Il me manque encore des pièces. Peu. Mais rien de pénible comme la pièce manquante perdue à la terminaison d’un puzzle. Il m’en manquera toujours plus d’une. La vue d’ensemble est là. Une image se dégage. Je me fous du pourquoi c’est arrivé. Le comment m’obsède encore. Et c’est peut-être de ça dont il me faut faire le deuil. Merci BAB.
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D’autres échos me viennent de camarades de travail ou d’ami qui ont pu regarder la 1ère version. Chacun est bouleversé. Ce que je fais a un sens. Caractère utilitaire indéniable.
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Ils tergiversent. On devait s’entendre pour le 15 septembre pour un dépôt à la SODEQ. Nous ne sommes pas prêts. Des agendas d’entreprise à concilier.
«Dans un ciel serein » reste dans la marge. Pourtant : « La marge, c’est ce qui tient le livre ensemble. » (Jean-Luc Godard).
En attente d’une implication ou non de leur part dans la 1ère semaine d’octobre. Au bord du raz-le-bol.

À suivre.